A quoi sert le sommeil? « Le sommeil sert à préserver l’énergie, à favoriser la sécrétion d’hormones de croissance, il aide à la maturation du cerveau et joue un rôle dans la consolidation des apprentissages et le développement cognitif. Pour le cerveau, le sommeil est un état neurophysiologique complexe et une période d’activité neuronale intense », explique la Dre Charline Urbain, de l’Unité de recherche en Neuropsychologie et Neuroimagerie fonctionnelle (UR2NF), à l’Université libre de Bruxelles.
Au cours de la nuit, nous passons cycliquement d’une phase de sommeil lent à une phase de sommeil paradoxal. C’est le sommeil lent qui intéresse la scientifique. Principalement sa phase de sommeil lent profond. « C’est pendant cette période que la synchronisation cérébrale s’opère entre les nombreuses zones du cerveau ». Chez l’enfant, on observe alors un développement de la maturation corticale et du développement des habilités cognitives», indique encore la chercheuse, qui travaille sur la consolidation des apprentissages.
Après une bonne nuit de sommeil, on assiste donc à une amélioration ou à une stabilisation des performances cognitives. « Cela concerne surtout les apprentissages déclaratifs, explicites, facilement verbalisables, ceux pour lesquels on a conscience de réaliser un apprentissage », dit la Dre Urbain.
« A l’ULB, nous menons notamment des études sur impact du sommeil sur les processus cérébraux qui sous-tendent les apprentissages chez l’enfant. Nous travaillons par exemple sur un groupe d’enfants âgés de 8 à 11 ans et nous nous intéressons aux effets de la sieste sur leurs apprentissages ».
Comment le sommeil participe-t-il à cette consolidation des apprentissages? Via le phénomène de plasticité cérébrale. « Les oscillations lentes du sommeil profond ont le pouvoir de réactiver les informations acquises récemment et stockées dans la région de l’hippocampe du cerveau pour les faire passer vers les aires néocorticales, et une mémorisation à plus long terme », précise la scientifique.
Cela avait déjà été testé par de nombreuses études chez des adultes. Les recherches de Charline Urbain confirment cela chez l’enfant. Elles montrent aussi que l’effet du sommeil semble même être accéléré chez l’enfant.
« Cette étude suggère qu’une sieste de 90 minutes, effectuée après un apprentissage, est suffisante chez l’enfant pour influencer les processus de plasticité cérébrale permettant la réorganisation des informations entre la région hippocampique et le cortex frontal (mémoire à long terme). Cela avait déjà été observé en 2006 chez l’adulte, mais après plusieurs jours, voire plusieurs semaines. Des dernières études ont montré que cette consolidation serait plus rapide chez l’enfant. Pourquoi? Notre hypothèse est que pour une même durée de sommeil, la plus grande proportion de sommeil à ondes lentes chez l’enfant par rapport à l’adulte pourrait accélérer le phénomène de consolidation des apprentissages”.
« Nous parlons bien ici de simples constats », précise encore Charline Urbain. « Pas de l’établissement d’un lien de cause à effet. S’agit-il d’un épiphénomène? Ou un sommeil perturbé peut-il entraîner des troubles cognitifs? À moins que la relation fonctionne dans l’autre sens? La question reste ouverte au sein de la communauté scientifique ».