« Fabriquer » de la peau est une pratique relativement banale en médecine. Un petit ballon est d’abord placé sous l’épiderme, puis il est gonflé. La pression mécanique induite par cet extenseur génère alors un excès de peau qui peut ensuite être utilisé pour réparer diverses zones malades, suite à une malformation de naissance par exemple, ou après une mastectomie. Mais quels sont les mécanismes moléculaires impliqués dans cette génération de peau suite à un stress mécanique ? C’est ce que viennent de découvrir des chercheurs de l’Université libre de Bruxelles.
L’étude des chercheurs de l’équipe du Pr Cédric Blanpain, qui dirige le Laboratoire des Cellules souches et cancer de l’ULB, a pu démontrer que l’étirement provoquait une expansion de la peau en suscitant l’autorenouvellement des cellules souches de la peau. Ils ont aussi mis au jour des voies de signalisation responsables de l’activation des cellules souches et du renouvellement provoquées par l’étirement.
C’est en travaillant sur des souris que les chercheurs ont fait cette découverte. Ils ont marqué les cellules souches de leur peau et ont suivi l’évolution de leur descendance au cours du temps.
C’est ainsi qu’ils ont pu identifier que seule une sous-population de cellules souches changeait son comportement et son destin cellulaire en réponse à l’étirement mécanique. « Il était particulièrement intéressant d’observer que toutes les cellules ne répondaient pas de manière égale aux perturbations mécaniques et d’identifier pour la première fois la signature moléculaire qui caractérise ces cellules souches cutanées étirées », commente Mariaceleste Aragona, la première auteure de l’étude.
En collaboration avec Benjamin Simons, de l’Université de Cambridge, les chercheurs ont également développé un modèle mathématique qui explique le comportement des cellules souches qui permettent à la peau de s’étendre par étirement. « Durant l’expansion tissulaire par étirement, une augmentation temporaire de la division permet aux cellules souches de s’autorenouveler et aux tissus de maintenir leur composition et leur organisation cellulaires, tout en augmentant le nombre de cellules qui vont permettre l’expansion tissulaire », indique l’ULB.
« Ces nouvelles découvertes dévoilent non seulement la manière dont la peau réagit aux perturbations mécaniques à travers l’activation de populations de cellules souches spécifiques, mais mettent aussi en lumière les acteurs moléculaires responsables de la mécanotransduction dans un contexte clinique pertinent. Nous espérons que la compréhension de ces nouveaux mécanismes sera exploitée dans le futur afin de stimuler l’expansion tissulaire et la cicatrisation”, précise le Pr Cédric Blanpain.