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La communication « grise » des hommes et des femmes politiques en période électorale sous la loupe des chercheurs

Les chercheurs de l’UCLouvain et de la VUB viennent de boucler une analyse des caractéristiques linguistiques des propos d’hommes et femmes politiques sur les réseaux sociaux en période électorale. Cette recherche, menée par Pauline Dupret et Andrea Pizarro Pedraza (UCLouvain) ainsi que par Raymond Harder (Vrije Universiteit Brussel), a été réalisée à la demande d’UNIA, l’institution publique qui lutte contre la discrimination et défend l’égalité des chances en Belgique.

« La frontière entre les opinions et les discours incitant à la haine n’est pas toujours facile à déterminer. Il subsiste entre les deux une catégorie intermédiaire de discours qui peuvent alimenter ou justifier la discrimination ou la haine envers certains groupes, sans y inciter explicitement », expliquent les auteurs de ce rapport.

La recherche qu’ils ont menée vise à montrer les stratégies et phénomènes linguistiques caractéristiques des messages de cette « zone grise » entre opinions et discours incitant à la haine.  Les messages ont été collectés au cours de la campagne électorale de mai 2019 et durant les mois qui ont précédé cette campagne, de manière à pouvoir comparer les discours produits durant ces deux périodes. « À cet égard, l’analyse n’a pas révélé de différences significatives entre les deux périodes en ce qui concerne les discours incitant à la haine, ce qui pourrait être dû à un mode de campagne ‘permanent’ », soulignent les chercheurs.

Ils constatent aussi que les messages analysés contiennent très peu de stratégies incitant ouvertement à la haine. Ils se basent surtout sur un langage implicite et indirect. « Ils suggèrent plus qu’ils n’affirment que certains groupes représentent un problème voire un danger ».

Pour le corpus analysé, ces messages ont été produits majoritairement par des candidat.e.s de Listes Destexhe et du Parti Populaire, mais ils apparaissent également dans le discours de personnalités importantes d’autres partis francophones.

« Presque tous ces messages en néerlandais proviennent d’un seul et même parti politique, le Vlaams Belang. Ensuite vient la N-VA avec un nombre très limité de cas. Cela signifie que l’utilisation contestable du langage par les politiques sur les médias sociaux en Flandre est un phénomène qui ne touche pas la grande majorité des partis (du moins pas dans le corpus que nous avons étudié) ».

« La nature implicite et indirecte des discours est un atout majeur pour les auteurs de ces messages. D’une part, elle leur permet d’éviter d’être critiqués, voire condamnés si leurs propos transgressent certaines limites légales : comme ils n’ont pas formulé les choses de manière explicite, ils peuvent toujours prétendre qu’on les a mal compris ou qu’ils n’ont pas dit ce que leur message laisse pourtant entendre. D’autre part, comme le montre d’ailleurs l’analyse des réactions des citoyen.ne.s à ces messages, cela n’empêche en rien leur discours d’être très efficace et d’être compris par celles et ceux auxquels il s’adresse : pour être compris par ceux qui partagent leurs représentations ou leurs opinions, il n’est même pas nécessaire d’être explicite ».

« Ces personnes réagissent de manière voulue et vont souvent plus loin que les auteurs des messages. Cette manière de faire passer des messages de manière implicite aux personnes qui partagent un même imaginaire est connue dans la littérature sous le nom de dog whistle strategy (‘stratégie du sifflet à chiens’) », résument les chercheurs.

« Sans inciter directement à la haine, les discours analysés contribuent à véhiculer une image très monolithique et négative de certains groupes sociaux, tout en s’appuyant pour ce faire sur un imaginaire partagé et constitué par l’ensemble des discours qui circulent dans le débat public », écrivent encore les chercheurs.

Leurs rapports sont disponibles en français et en néerlandais.

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